06/12/2007

Le petit prince est mort


Il hésita encore un peu, puis se releva. Il fit un pas. Moi je ne pouvais pas bouger.
Il n'y eut rien qu'un éclair jaune près de sa cheville. Il demeura un instant immobile. Il ne cria pas. Il tomba doucement comme tombe un arbre. Ça ne fit même pas de bruit, à cause du sable.


Il y a des choses comme ça qui vous touchent et qui pourtant ne vous marquent pas. Si je dis "dessine-moi un mouton", tout le monde saura à quoi je fais allusion, au petit prince en l'occurrence, mais au final les gens ne connaissent pas cette histoire.
L'autre jour, Sylf et moi discutions du petit prince. Lorsque je lui ai parlé des baobabs, il m'a regardé bizarrement. Lorsque je lui ai dit que les baobabs détruisaient les planètes, il a cru que je parlais de l'étoile noire. Et quand je lui ai dit qu'à la fin le petit prince mourrait à cause d'un serpent, il ne m'a pas cru.
Bien sûr j'ai eu raison, même si la notion de mort est relative dans ce cas.

J'ai donc relu le petit prince. Il y a des choses comme ça qui vous transpercent, qui nous donne l'impression que le monde ne sera plus jamais pareil quand vous le regarderez. J'ai eu ça avec le petit prince, tout comme je l'ai aussi ressenti avec La nuit des temps, ou en regardant Lain.

Mais ce qui est marquant dans le petit prince, c'est ce double dialogue permanent entre l'adulte et l'enfant. Ce regard double sur le monde, ce même monde vu par plusieurs personnes, à tel point qu'il ne s'agit plus du même monde.

Et si j'étais seul au monde ? Sur ma petite planète, côtoyant 6 milliards d'autres petites planètes identiques mais différentes ?
Si ça se trouve, il n'y a pas une dimension, mais une multitude, et le monde ne serait rien d'autre qu'un lieu multidimensionnel, résultat du mélange de chaque dimension, chacune représentant la perception de son environnement par une entité sensible telle que nous nous considérons.
Ce qui expliquerait que malgré tout, il nous est strictement impossible de vivre dans le même monde que les autres, avec la meilleure volonté du monde, puisque nous ne pouvons rester que dans le nôtre.


Je vois du bleu, et par convention et depuis des siècles, nous appelons cela "bleu". Mais il est strictement impossible que je vois le bleu exactement de la même façon que mon voisin, pour des raisons biologiques, psychologiques, sociologiques, ou ethnologiques. Mon bleu appartient à mon monde et n'appartient qu'à moi.
Un daltonien par exemple le verra rouge, mais par convention il l'appellera bleu alors que pour lui il s'agira indubitablement de rouge, de son rouge.
La parole et les mots ne sont donc qu'une convention pour tenter de nous comprendre les uns les autres, et c'est un système encore perfectible, mais qui a le mérite de poser des notions arbitraires nécessaires pour bâtir un point de départ.
Cependant, le verbe est insuffisant pour traduire ne serait-ce que l'essence de notre perception du monde. Quand on y ajoute aussi une grosse difficulté à structurer ces idées, ce que je rencontre actuellement, ça donne un article de blog qui va probablement faire penser que je me drogue. Ce n'est pas le cas, je n'ai juste toujours pas trouvé un moyen de communication inter dimensionnel plus fiable que les mots.

Notez que c'est déjà bien d'essayer de communiquer, mais cela nous a fait grandir dans l'illusion d'un monde commun. Laissez tomber, on est seul et on le restera à jamais, mais qui sait, un jour parviendrons-nous peut-être à traverser les dimensions.

Promis, la prochaine j'essaye de parler d'un truc normal.


5 commentaires:

  1. Tu n'étais pas obligé de rédiger une telle diatribe pour justifier ton simple désir de m'humilier en remettant sur le tapis cette histoire de baobabs et de serpent.

    En plus, leur importance reste relative dans l'oeuvre, selon le regard qu'on lui porte.

    Assume donc ! Cesse de dissimuler tes pamphlets moqueurs derrière des développements faussements songeurs, tu es un enfoiré, et puis c'est tout.

    Nan mais, sérieux, quoi, hein, hé, ho.

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  2. .... il me fait peur des fois...

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  3. Meuh non faut pas avoir peur ^^"
    Sylf le prends pas mal, mais... j'avais raison ^^

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  4. Je suis pas tout à fait d'accord avec toi Yenyen. Le petit prince ne meurt pas, il retourne juste chez lui.
    Tu as mis le passage où il tombe sous l'effet du venin du serpent jaune, mais tu as enlevé ce qu'il dit juste avant et ce que dit le narrateur juste après. Et cela change tout la vision que l'on peut avoir de ce passage.

    Pour moi le petit prince n'est pas mort, et il continuera à s'occuper des baobab aidé par son mouton...

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  5. Il est terrestrement mort si ça peut te faire plaisir, mais mort quand même...

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